Thomas Hamory
De fausses fenêtres ?!
Dernière mise à jour : 23 févr. 2022
Premier article sur l'architecture et l'histoire, ou plutôt comment l'histoire a-t-elle modifié l'architecture en France et dans le Monde.
Vous avez déjà certainement été intrigué devant une façade d'immeuble, vous demandant pourquoi certaines fenêtres n'en sont en réalité pas. Elles sont parfois simplement murées, parfois devenues de véritables œuvres d'art. Un trompe-l'œil judicieux qui prend tout son sens lorsqu'on fait un retour dans le temps.

En 1798, le Directoire met en place la taxe sur les portes et les fenêtres. Quelle idée ! Mais oui, une taxe était bien mise en place pour ceux qui en possédaient. Signe extérieur de richesse, le ministre des finances Ramel a choisi ce système comme base d'imposition. En vigueur pendant plus d'un siècle, cet impôt aussi insolite soit-il a laissé des traces inconsidérables sur notre patrimoine.
Beaucoup de propriétaires ont répondu à cette taxe tout simplement en condamnant certaines de leurs fenêtres, et les ont reproduits en trompe-l'œil ou remplacées avec des ouvrages moins coûteux pour que les façades ne soient pas dénaturées. D'autres moins fortunés les ont simplement détruites, privant ainsi les habitants de lumière. L'évaluation de l'impôt ne concernait pas seulement le nombre, mais aussi la taille et le style. Par exemple, les magnifiques fenêtres à meneaux comptaient pour quatre fenêtres. Très en vogue auparavant dans l'architecture parisienne, on ne les trouve que très rarement aujourd'hui, comme ici à l'Hôtel de Cluny.

Cet impôt fût très largement remis en question et contesté, notamment par les hygiénistes qui ont réussi à le faire s'éteindre en 1926 au profit de l'impôt sur le revenu. En effet, et vous vous en doutez bien, beaucoup de logements sont devenus insalubres ! Les hygiénistes qualifiaient même cet impôt de « taxe sur la consommation d’air et de lumière ».
D'ailleurs, Victor Hugo (comme plusieurs autres auteurs) en parle dans son roman "Les Misérables". Souvenez-vous de ce qui prononce Monseigneur Myriel lors d'un sermon : « Mes très chers frères, mes bons amis, il y a en France treize cent vingt mille maisons de paysans qui n'ont que trois ouvertures, dix-huit cent dix-sept mille qui ont deux ouvertures, la porte et une fenêtre, et enfin trois cent quarante-six mille cabanes qui n'ont qu'une ouverture, la porte. Et cela, à cause d'une chose qu'on appelle l'impôt des portes et fenêtres. Mettez-moi de pauvres familles, des vieilles femmes, des petits enfants, dans ces logis-là, et voyez les fièvres et les maladies. Hélas ! Dieu donne l'air aux hommes, la loi le leur vend. ».
Voilà comment l'histoire a modifié l'architecture.
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